Paris le 1er mars 1961

Ma chère Suzanne

Depuis le temps que vous n’avez pas reçu de nouvelles de moi, vous devez vous imaginer que je suis passé dans l’autre monde.

Il n’en est rien, mais je dois dire que durant toutes ces dernières semaines mon temps a été bien haché, toujours à propos de mon éternelle cousine pour laquelle j’ai dû intervenir en multiples démarches afin de tenter de la soustraire – tout au moins momentanément – à de terribles soucis.

En effet, à la suite de ses séjours répétés dans des hôpitaux, elle doit à l’Assistance Publique une somme de 850 000 f. qui lui fut réclamée à diverses reprises pour aboutir enfin à un e sommation d’un agent de poursuite judiciaire, l’informant que son mobilier allait être saisi puis vendu. De la sorte, elle se trouvait complètement à la rue, puisqu’elle n’aurait plus de meubles pour justifier une occupation normale de son appartement.

Aussi j’ai dû faire quantité de démarches pour écarter ce coup de massue. Je ne sais pas encore si je réussirai à un résultat positif.

Mais parlons plutôt de vous. Je suis bien navré d’apprendre que vous ne trouvez toujours rien. Les personnes importantes que vous connaissez (ancien préfet, général en retraite) ne pourraient-elles donc pas, par leurs relations, vous procurer quelque chose ?

Je vous conseille de vous mettre en rapports, à tout hasard, avec le Président de la Chambre de Commerce de Nice (située 20 bd Carabacel) pour lui demander un entretien afin de lui exposer votre cas. Mieux que personne, il serait bien placé pour vous donner des indications utiles.

A ce sujet, je vous glisse une petite coupure qui vous montrera que même à Nice il se crée des organismes nouveaux susceptibles d’employer du personnel de Secrétariat. Tâchez de vous renseigner à leur sujet.

Le monsieur, dont vous étiez la collaboratrice, n’a vraiment pas de chance avec sa femme et je crains bien que vous ne deviez faire votre deuil de ce qu’il vous doit. Pour vous aider un peu, je vous adresse le petit mandat ci-joint.

Ma santé continue à être « entre les deux ». La vie de Paris est plutôt fatigante surtout à mon âge. Je ne puis guère faire de projets. J’aurai bien aimé venir vous voir jusqu’à Nice, mais ma Chambre Syndicale n’accorde pas de congé en cours d’année, sauf motif valable (maladie par exemple).

Je vous quitte, chère Suzanne, en vous embrassant de tout mon cœur et en faisant mille vœux pour que votre situation s’arrange un peu.

Henry

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