Dimanche 10 avril 49

Ma pauvre petite Suzanne

Vous ne devez plus rien comprendre à rien, avec tout ce silence.

Vous devez bien deviner quand même que depuis 2 mois les choses ne vont pas bien pour moi. C’est ce qui fait que je n’ai plus eu le courage de vous écrire, laissant ainsi vos dernières lettres sans réponse.

Me débattant au milieu de difficultés extrêmes, j’attendais toujours de rétablir la situation pour vous écrire. Et ainsi le temps passait.

Je vous écrirai plus longuement ces jours-ci pour vous expliquer. En attendant, je vous adresse aujourd’hui ce simple mot qui amorcera de plus amples détails prochains.

En style haché et pour parer au plus pressé de votre attente, je vous dis donc :

1°) Je m’efforce présentement de réaliser certaines choses pour pouvoir vous envoyer aussitôt un mandat.

2°) J’ai été enchanté d’apprendre que votre maman vous accompagnerait à Paris pour habiter avec vous dans mon petit appartement. Mais en plein été (juillet et aout) vous ne vous reposerez guère à Paris par une chaleur étouffante et votre présence à cette époque n’aurait aucune utilité pratique, toutes les personnes utiles que vous pourriez voir se trouvant en vacances.

3°) Il serait pour vous et votre maman plus agréable que vous passiez ces 2 mois d’été à Concorès, où vous seriez très tranquilles puisque le curé n’y habite plus. Et vous auriez ainsi, après un séjour calme et reposant, plus de forces pour affronter Paris.

Dans ma prochaine lettre, je vous raconterai tous les ennuis matériels que m’a causé un ami, associé avec moi pour la Loi des Loyers et qui a chapardé la caisse…

Je pense à vous avec tristesse par suite de mon impuissance actuelle. Ne m’en veuillez pas trop toutefois. Je m’efforce de toute mon énergie à sortir de l’épreuve dont vous avez ainsi subi le contre-coup.

Bien affectueusement à vous.

Henry

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