Paris le 9 aout 1943

Ma pauvre amie
De retour d’une nouvelle absence je trouve votre lettre du 30 juillet qui me navre et m’enchante à la fois.
Je suis infiniment heureux à la pensée de vous revoir sous peu, combien par contre je suis désolé que ce soient des circonstances si dramatiques qui vous obligent à quitter Nice si précipitamment. Dire que les autres années vous étiez, à pareille époque, en vacances dans les montagnes de Savoie ! Pauvre, pauvre amie, comme je vous plains, comme votre vie actuelle est malheureuse. Vous ne méritiez vraiment pas un pareil tort !
La question du logement est actuellement terrible à Paris et de plus, je n’y séjourne que par intermittences. Mais puisque vous devez quitter Nice au plus tard le 20, il faut absolument arrêter quelque chose, n’importe quoi quitte à chercher ensuite ce qui pourrait vous convenir mieux. Il reste toujours la solution de prendre pour le moment une chambre dans un hôtel, ce qui vous permettrait de vous installer ici et d’attendre qu’il se trouve un autre local. Si donc je ne trouve pas mieux, dites-moi par retour de courrier, si je puis vous retenir une chambre dans ces conditions. Cela permettrait de gagner du temps pour pouvoir ensuite s’arranger autrement. Je crois qu’il n’y a pas à hésiter puisque c’est votre destinée qui est en jeu.
Répondez-moi donc de suite, si vous êtes d’accord dans ce sens et je vous préviendrai aussitôt que j’aurai arrêté quelque chose pour vous.
Croyez, ma chère amie, à mes plus affectueuses pensées.
Henry