Paris samedi 26 novembre 1960

Ma chère Suzanne

Je comprends parfaitement que vous soyez mécontente de moi et vous ne me le laissez pas ignorer, comme me le prouve votre dernière lettre que je viens seulement de lire, à mon retour après plusieurs semaines d’absence.

En effet, peu de jours après votre départ, j’ai été appelé d’urgence à Concorès par une lettre alarmante qui me signalait que ma propriété et mon habitation venaient de subir de graves dégâts à la suite d’inondations catastrophiques.

Je suis donc parti précipitamment car ma présence était nécessaire pour parer au plus pressé. J’ai, en effet, constaté en arrivant chez moi qu’il y avait encore 80 cm d’eau au rez-de-chaussée, tout étant transformé en un véritable lac ; les murs entourant les jardins étaient écroulés ; les fondations-mêmes de la demeure ébranlées sous l’action du torrent furieux du Céou qui, débordé, recouvrait toute la vallée.

J’ai dû faire un minimum de réparations d’urgence pour empêcher les dégâts de s’aggraver. Mais comme un malheur n’arrive jamais seul, j’ai attrapé en séjournant dans cette maison qui était plus qu’humide, on peut même dire aquatique, une broncho-pneumonie, à la suite de laquelle j’ai éprouvé de sérieux troubles cardiaques.

Vous savez que, lors de votre séjour à Paris, je n’étais pas dans un état très brillant et vous comprendriez sans doute que ces évènements, et ce qui s’en est suivi pour ma santé, m’ont singulièrement mis à plat.

Vous comprendrez également, du moins j’ose l’espérer, que je n’étais guère en état, au milieu de ces tourments, de correspondre avec la sérénité d’esprit nécessaire.

Je répondrai ces jours-ci aux divers points de vos lettres au sujet desquels je m’expliquerai franchement.

Mais je tiens à faire partir cette lettre aujourd’hui-même, tenant à parer pour vous au plus pressé en vous adressant le mandat ci-joint pour vous aider dans des circonstances que vous me dites difficiles et qui me peinent infiniment.

Je vous souhaite et j’espère que les choses finiront par s’arranger pour vous. Tenez-moi au courant, mais avant de me répondre, vous recevrez une autre lettre de moi répondant aux diverses observations que vous me faites.

En attendant, je vous embrasse, chère Suzanne, bien affectueusement.

Henry

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